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Mouvement du 20 février ou la politique sans les partis

 

 

L’on ne peut rester insensible face à l’émergence de ces mouvements de contestation  spontanés
qui secouent le monde Arabe depuis mi-décembre 2010. L’on comprendrait aisément cette résurgence protestataire dans les pays Arabes qui ont vécu sous l’état d’exception depuis des décennies, ou soumis  au pouvoir d’un parti unique institutionnalisé ou déguisé, ou encore subjugué au pouvoir sans partage d’un seul homme. L’on éprouve quelques écueils à expliquer l’éclosion du mouvement du 20 février au Maroc, pays pourtant, aux traditions institutionnelles bien ancrées,
au pluralisme politique bien réel, à l’espace des libertés peu contraignant. D’autant plus éprouvant à la compréhension lorsque les doléances du mouvement févriéristes pouvaient bien être portées par les partis politiques ou par les centrales syndicales pour ce qui est des revendications purement corporatistes. Alors, qu’est-ce qui a pu donner naissance à ce mouvement dans le paysage Marocain ? La jonction de deux facteurs, l’un transnational –presque une donne structurelle- lié à la globalisation et au Consensus de Washington, l’autre national lié au comportement des relais sociaux, notamment les partis politique. Ainsi, le premier facteur supranational, ayant procrée ces
mouvements de contestation « désencadrée » trouve son origine dans le « pattern » de gouvernance appuyé sur une démocratie limitée uniquement à sa dimension politique et sur une économie de marché ultralibérale, avec une forte propension  à la financiarisation et au servicing de l’économie. L’égalité juridique prônée par ce modèle de gouvernance auquel est arrimé le Maroc  ne s’est pas traduite par une égalité sociale. De plus, la redéfinition du rôle de l’Etat le cantonnant à celui d’un Etat-concessionnaire creuse chaque jour un peu plus les inégalités de chance et les écarts de revenus, gonfle le banc des chômeurs et des « poor worker » et « prodigue » la pauvreté. En résumé, la démocratie libérale a montré ses limites face à l’exacerbation des déficits sociaux y compris en Europe. Le deuxième « creuset » des germes de la protestation « désorganisée » a trait aux contreperformances de l’action partisane dans notre pays. Aussi bien les partis de la majorité
gouvernementale que ceux de l’opposition se sont égarés dans les méandres du pouvoir et n’animent plus comme par le passé le débat  intellectuel. Leurs credo ne sont plus évocateurs, ne fédèrent plus les forces populaires. Au contraire, ils ont exacerbé la désaffection de la chose politique. Nos partis, qui disposaient d’un certain crédit auparavant, se sont  recroquevillés et ont perdu le sens du peuple. En somme, un peuple qui ne s’identifie plus dans des partis qui disent défendre un idéal démocratique que contredit et contrarie leur propre comportement au sein même de leur propre organisation (soleil), où le leadership est vertical, les ordres tenant lieu de débat et la soumission de discipline. C’est dans cet environnement de fracture sociale et de repli des partis sur eux-mêmes qu’est né un déphasage entre les attentes des citoyens et les programmes des partis
politiques, qui ont perdu la confiance populaire, dès-lors qu’ils ont cessé d’être les leviers de la solidarité sociale et encore moins porteurs d’un projet sociétal. Nos partis politiques se sont transformés en simples partis de « cadres », de simples machines électorales, s’intéressant davantage aux maroquins de la députation et aux sièges du gouvernement. Corollaire : la démocratie représentative a perdu de son attrait. Bien plus elle est de plus en plus remise en cause y compris dans l’Occident, preuve en est la grogne « sans les partis » des jeunes Espagnols.   

Ainsi donc ont émergé ces mouvements de colère en substitution aux organisations partisanes pour faire de la politique sans les partis.

En conclusion,
le défi aujourd’hui de notre classe politique est de tisser des liens entre le mouvement du 20 février pour bridger l’hiatus entre société et politique. Ce ne peut se faire que par une politique d’intégration de ce mouvement et de tout autre mouvement de société qui constitue aujourd’hui un noyau embryonnaire de la démocratie « directe ».

En réalité, la politique n’est plus l’apanage des seules constructions partisanes. Il faudrait peut-être associer pour l’impliquer ce nouvel acteur (réseau) social qu’est le mouvement de 20 février outre les organisations de la société civile dans les consultations relatives à la chose publique.

Une autre façon de faire de la politique doit, donc, être pensée et créée pour passer de la démocratie politique à la démocratie sociale.

 

                                                                                                                            
                                                                                                                      Mostafa Melgou      
                                  

 



12/07/2011
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