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L’Eurozone à la croisée des chemins?

L’UE affronte un choix difficile, ou soit l’intégration totale ou soit l’implosion de la zone EURO. l’UE a besoin de " bridger " le gap entre la rhétorique d’une Europe unie et intégrée que contrarie la réalité têtue des intérêts égoïstes nationaux. Ce gap portera un coup fatal à la survie de la zone Euro et à sa monnaie unique. Car à moins que la réalité ne parvienne à être en phase avec la rhétorique, c’est toute la construction de l’Union qui s’effilochera.

Le package de mesures financières prônées pour re-stabiliser la zone Euro se décline sous forme d’un déblocage supplémentaire d’€ 60 bln en faveur des pays dont la balance des paiements est déficitaire et la mise en place d’un " special purpose vehicle " doté d’€ 440 bln pour consolider les budgets des États en difficulté. D’aucuns se complaisent à jeter leur dévolu sur des attaques spéculatives contre l’Euro, ou sur la surenchère des marchés financiers qui sèment la panique ou encore sur des investisseurs qui conjurent que la crise perdure pour en tirer profit. Autant de mauvaises pistes et de fausses prémisses, avec le vœu que si l’UE donnait un signal clair et fort aux marchés, l’Euro serait soutenu et sauvé. Or, quand bien même le package serait approuvé et l’argent disponible – pas aussi évident qu’il ne paraisse- les marchés ne seront pas satisfaits pour autant. Et pour cause, les incertitudes des perspectives de croissance dans les États de l’Europe méridionale et l’Irlande. C’est dire que si les économies sinistrées de ces pays n’affichaient pas des signes de reprise économique à brève échéance et ne jugulaient pas la déflation, des pays comme la Grèce ou le Portugal et tous les autres qui sont dans le "pipe" Dantesque n’auront aucun avenir au sein de la zone Euro. L’UE est en train tout simplement de gagner du temps, sans apporter de solutions pérennes à la crise. En effet, la crise Européenne a dévoilé au grand jour les dysfonctionnements de la construction monétaire de l’Union, que cachait la croissance économique des années antérieures. Et la récession qui s’installe aujourd’hui risque de neutraliser toutes les mesures d’austérité et des coupes budgétaires qui paradoxalement ne feront que la nourrir. Un véritable cercle vicieux.

Les places financières ont raison de douter de la pérennité de la zone Euro. Pour contrebalancer les effets des coupes budgétaires et les délestages des salaires, les économies des États de l’Europe méridionale en difficulté ont besoin d’une forte impulsion de leurs exportations qui doivent croître plus rapidement que leurs importations sur une période plus ou moins longue. Retournement de situation peu probable dans le court terme. A défaut de dévaluation- impossible unilatéralement- ils restent dépendants de la reprise de la demande extérieure et de la capacité de leurs entreprises à être compétitives au sein de l’EUROZONE. C’est d’autant improbable tant qu’Allemands et Néerlandais n’auront pas renoncé à leurs excédents commerciaux en achetant plus qu’ils n’en vendent à leurs partenaires, leur offrant ainsi plus de chance pour accroître leurs exportations et atténuer leurs déficits commerciaux respectifs. Mais pour accroître les exportations, il faut que les produits destinés à l’exportation soient compétitifs. Or le meilleur moyen pour gagner en compétitivité passe inéluctablement par l’amélioration du rendement. Il s’agit là d’un pari au long terme que les États de l’Europe du SUD n’ont pas encore entamé. Ils n’ont donc d’autres choix que de comprimer les dépenses et charges par rapport au reste de l’Eurozone.

Le dilemme de l’UE, aujourd’hui, c’est que les mesures d’austérité, si elles étaient adoptées par tous les pays et simultanément, le résultat serait un blanc nul qui se traduira par la dépression et la déflation . Car, quand quelques pays décident l’austérité est une chose ; mais c’est tout à fait autre chose quand tous les pays de l’Union optent pour l’austérité..

Si les déséquilibres persistaient et les balances (commerciales et de paiement) demeuraient non balancées (imbalanced), une union budgétaire serait nécessaire à la survie de l’Eurozone, ayant à l’esprit que les pays touchés par la crise ne peuvent recouvrer leur santé financière tant que leurs déficits n'auront pas été apurés. Mais une Union budgétaire supranationale commune risque d’achopper sur des résistances nationales égoïstes, dès lors que pour que cette union aboutisse, il est impératif d’implémenter au préalable un dispositif juridique pour jeter les jalons d’une solidarité intra-Eurozone plus que nécessaire actuellement. Cela revient à dire que les impôts et taxes prélevés sur l’Allemand ou sur le néerlandais puissent être transférés au bénéfice du Grec ou du Portugais en difficulté, sans que l’Allemand ou le néerlandais n’y trouve à redire, même quand c’est à contre- cœur.

Il apparaît aujourd’hui que lorsque les Européens avaient ratifié la monnaie unique, ils n’avaient pas réalisé ni ne s’étaient rendu compte que, à défaut de performances économiques égales, la monnaie unique requiert l’intégration totale de la politique et de l’économie au sein de l’UE. La classe politique de l’UE est aujourd’hui appelée à expliquer et à convaincre citoyens de cette de cette problématique. Pour fonctionner, l’Euro a besoin d’une grande solidarité qui fait défaut aujourd’hui dans l’espace Euro monétaire.

En conclusion, nous ne pouvons imputer aux marchés financiers tous les maux économiques de l’UE. Ces marchés demeurent, néanmoins, coupables d’avoir mordu à la rhétorique pieuse d’une Union intégrée , dès lors qu’ils considéraient, jusqu’à quelques mois avant la crise, l’UE comme étant un seul bloc, où la Grèce pouvait emprunter au même taux que l’Allemagne partant du postulat qu’il est impossible qu’un pays de l’Union puisse être rattrapé par la cessation de paiement. Un véritable non-sens s’il en est.

                                                                                Mostafa Melgou



31/05/2010
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