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Le coefficient d'exploitation: une lecture plurielle

Le coefficient d’exploitation est un rapport qui renseigne sur le niveau, la proportion des charges générales d’exploitation par rapport au Produit Net Bancaire (PNB). Ce dernier c’est l’ensemble des produits d’exploitation bancaire diminués des charges d’exploitation . Sur le P&L ( Profit and loss statement) des banques, les charges du personnel, les charges externes et les dotations aux amortissements des immobilisations corporels et incorporels représentent les principales rubriques et composantes des charges générales d’exploitation. Certes, le coefficient d’exploitation en tant que rapport dans l’absolu, donne un ordre de grandeur des charges générales d’exploitation par rapport au PNB. Comprenez que c’est un ratio qui s’apparente au taux de rendement ou de performance d’exploitation. En d’autres termes, il s’agit de s’interroger combien a-t-on besoin et a-t-on consommé de charges générales pour réaliser un PNB donné ? En d’autres termes encore, il s’agit de répondre à la question suivante, combien le Personnel, hommes et femmes d’une banques a-t-il été rémunéré de ses efforts pour performer un tel PNB et combien la banque a-t-elle investi aussi pour le réaliser, en terme de renforcement du réseau d’agence et de logistique.. etc. Dès lors, il est nécessaire d’apprécier le coefficient d’exploitation à l’aune de la politique de rémunération de la banque, c’est à dire de sa politique de gestion des ressources humaines et de sa politique d’investissement, en somme de sa volonté de croissance. Bien entendu, une banque en quête de croissance a besoin d’investir et de recruter. Donc, elle aura certainement un coefficient d’exploitation plus élevé que celui d’une banque en repli sur les investissements ou encore une banque hantée par le seul souci budgétaire. Qu’on ne se méprenne pas. Schématiquement et sommairement, le PNB d’une banque est destiné d’une part à rémunérer le Personnel et faire face aux dotations aux amortissements et d’autre part à rémunérer les actionnaires. Ces derniers sont très proches et très regardants de leur ROE ( return on equity) c’est à dire le retour sur fonds propres, qui leur sera versé sous forme de distribution de dividendes. En reprenant le coefficient d’exploitation de BMCE Bank, on pourra affirmer qu’il ne reste aux actionnaires que 36,5% du PNB, dont il faudra défalquer les dotations nettes aux provisions pour créances douteuses et l’IS. Mais ce constat ne doit en aucun cas être compris comme étant un synonyme d’une quelconque gestion peu probante de cette banque. Bien au contraire, ce constat peut être la manifestation d’une volonté d’assurer un mieux être en terme d’ergonomie, de motivation des ressources humaines et d’investissement en formation. D’ailleurs, gérer les besoins en formation par le tout budgétaire n’est pas conseillé, car le retour sur investissement en terme de formation relève du moyen terme, en expertise et en rayonnement professionnel. Malheureusement, les décideurs ont généralement tendance et adoptent une attitude timorée dès lors qu’ils sont en train de raisonner sur de l’intangible, notamment lorsqu’il s’agit d’investir dans les ressources humaines.

Bien entendu, les banques peuvent toujours optimiser leurs charges externes, par une moralisation des usages au quotidien ( bon usage du matériel et des fournitures). Mais attention il ne faut pas faire d’amalgame entre compressions tous azimuts et optimisation des charges, car ce faisant peut avoir un effet de massue. Et faire des résultats par la réduction des coûts lorsque les sources des produits se tarissent n’est pas tout le temps payant à terme. Gare à la paupérisation des ressources humaines. Un coefficient d’exploitation à 40% représente le seuil du tolérable, en deçà duquel l’on ne peut aller au risque de contre -productivité. Car d’aucuns ont tendance à mettre l’accent sur le rôle d’intermédiation, en occultant la dimension socio économique des banques et leur rôle de locomotive de développement du pays, aux orientations duquel elles doivent adhérer.

Je me rappelle ici le rôle qui avait été assigné au Conseil National de la Jeunesse et de l’Avenir ( CNJA), institution consultative créée dans les années 90 pour aider à l’insertion des jeunes diplômés dans le monde du travail. Je me souviens combien les textes et les objectifs étaient louables voire nobles. La démarche consistait pour les entreprises, qui croyaient à cet effort de solidarité, d’intégrer en sureffectif les jeunes diplômés pour l’équivalent de 10% du Personnel en place. En contrepartie, l’Etat dispense les employeurs des CNJA des cotisations de l’assurance- maladie, des cotisations de la retraite, les exonère aussi de l’IGR ..etc. Un ensemble d’avantages fiscaux et réglementaires que l’Etat Marocain a concédé à ces employeurs potentiels. Malheureusement, plusieurs entreprises avaient sauté sur l’occasion pour adhérer au plan CNJA, avec les exonérations qu’il confère, mais en vidant les textes de leur esprit. Pour le législateur, l’objectif recherché était le recrutement des jeunes diplômés, en leur assurant un petit salaire, subventionné de surcroît par le budget de l’Etat , dans la perspective que ces jeunes diplômés se forment et apprennent les métiers en vue de leur intégration dans le monde du travail. Mais des entreprises peu citoyennes avaient abusé de cette manne de L’Etat pour recruter CNJA de jeunes diplômés, en vue de répondre à des besoins réels et identifiés de recrutement, alors que dans l’esprit des responsables de CNJA, le recrutement devrait venir en sureffectif du Personnel existant, avec l’obligation de former ces jeunes apprentis. Mais pour les entreprises peu sensibles au sens de la citoyenneté, il s’agissait de profiter d’une main d’œuvre lettrée, mais à très bon marché. Il est à craindre que l’ANAPEC d’aujourd’hui, une sorte de CNJA rebaptisé, ne subisse le même sort que son prédécesseur et être détourné des fins qu’elle veut servir.

Bien entendu lorsqu’une banque se gargarise d’avoir les coefficients d’exploitation les plus bas du secteur, il faut chercher les raisons du côté du vivier ANAPEC. Mais attention au revers de la médaille : on ne peut bâtir une politique des ressources humaines, sur les réserves humaines de l’ANAPEC.

                                                                      Mostafa Melgou



17/04/2009
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