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L’indice de performance de l’Administration Marocaine (IPAM)

Dans les sociétés privées, il est un ratio clé de gestion qui départage les entreprises les mieux structurées de celles qui le sont moins. C’est le coefficient d’exploitation ( efficiency ratio) ou taux de rendement (return on salaries and wages).

Il renseigne sur le niveau des charges salariales requises pour réaliser un niveau donné de performances et surtout un niveau donné de résultat. En d’autres termes, il renseigne sur la portion consommée, amputée de la richesse créée par l’entreprise pour rémunérer le personnel. Plus les charges salariales sont maîtrisées, mieux sera le rendement du travail et mieux se comportera la rentabilité de l’entreprise. D’ailleurs, dans le " business plan " arrêté sur base annuelle par les entreprises, le coefficient d’exploitation prévisionnel occupe une place de choix dans les tableaux de bord du general management, dès lors qu’il est sous " high visibilty " et suivi de façon très rapprochée.

Qu’en est-il de la situation de ce ratio de rendement dans la fonction publique ? existe-t-il au sein des administrations publiques un dispositif de computation et de suivi du ratio d’efficience ? La réponse coule de source dès lors qu’elle est apportée en filigrane dans l’analyse des comptes de charges des finances publiques.

Etat des lieux. Le solde du compte " rémunération des salariés " stricto sensu ne cesse d’augmenter au fil des exercices. L’année 2004 a été prise comme année de référence, pour mettre en relief, en vue de l’apprécier à sa juste valeur, l’apport de l’opération du départ volontaire (DVD) entreprise en 2005, quant à un réel "downsizing " des effectifs de la fonction publique et par ricochet une réduction éventuelle des charges salariales des fonctionnaires. Le compte " rémunération des salariés " affichait un solde de Mad 72,3 bln en 2004. Il passe à 81,3 bln en 2005, puis à 82,4 bln en 2006, pour enregistrer Mad 89,2 bln en 2007 et clore l’année 2008 sur un solde de Mad 95,5 bln. L’analyse de l’évolution des chiffres aussi bien en valeur absolue qu’en valeur relative montre qu’en 2005 la masse salariale s’est alourdie de Mad 9 bln, soit +12% par rapport à 2004. Les retombées du DVD ne se faisaient sentir qu’en 2006, où l’accroissement des salaires a été contenu à 1% par rapport à l’exercice précédent sans pour autant infléchir la masse salariale qui, elle, s’est accrue en valeur absolue de Mad 1,2 bln. C’est dire que l’opération DVD a été un coup d’épée dans l’eau, avec en prime une ponction du budget de l’Etat de la bagatelle de Mad 14 bln induite par cette opération qui n’a conduit ni au down-sizing ni n’a maîtrisé les charges salariales. En effet, l’up trend des salaires a repris de plus belle pour enregistrer des augmentations de 8% en 2007 et 7% en 2008. Une comparaison plus récente fait ressortir un alourdissement de la masse salariale de 6% à fin juillet 2009 avec un solde Mad 42,8 bln par rapport au solde du même mois de l’exercice écoulé. C’est dire que l’exercice 2009 ne sera pas mieux loti en terme du poids de la masse salariale dans les charges publiques, d’autant que cette année en particulier, les recettes sont en down trend et les charges en up trend. Mais qui répondra de ce fiasco et rendra des comptes, en vertu du principe de l’ " accountability " cher à la pléiade d’auteurs du " Maroc possible "? la question reste posée.

Sur un autre registre, le tableau de bord mensuel des finances publiques fait ressortir que les salaires à eux seuls représentent 37,2% à fin juillet 09 des dépenses globales. Si on y ajoute le solde du compte "matériel & services" qui sont en fait des charges induites par les fonctionnaires dans l’exercice de leurs fonctions, le taux grimpera à 65% des dépenses globales, toujours à fin juillet 09.

L’autre critère d’appréciation du rendement des fonctionnaires- le plus significatif- demeure le rapport charges salariales sur le produit intérieur brut ( PIB). Comme tout le monde le sait le produit intérieur brut représente la valeur ajoutée totale créée par l’économie d’un pays sur l’année. Il s’agit de s’interroger sur la portion du PIB qui ira à la rémunération des fonctionnaires. Le taux est très loin des standards internationaux. Il oscille dans le cas Marocain entre 17,5 et 18,8% du PIB. En clair , il est fondé d’affirmer que les services de l’Etat coûtent très chers aux finances publiques et que la qualité de ses mêmes services est sans commune mesure avec les coûts qu’ils induisent. Dans le jargon de l’entreprise on dira que l’administration Marocaine est loin d’être compétitive comparée à ses " peers " des autres pays.

Il s’avère nécessaire aujourd’hui de procéder à une réforme de fond de la fonction publique en opérant d’abord une coupe drastique dans les effectifs " rossignol " ou " fantômes " dans les administration et les ministères. De même, qu’il faut dégrossir le nombre des organes de l’Etat qui font double emploi les uns avec les autres. Telle direction des prévisions économiques au sein d’un ministère des finances, qui fait double emploi avec le haut commissariat au plan (HCP) ou vice versa. A-t-on vraiment besoin de tout un haut commissariat – il s’appelait auparavant ministère des prévisions économiques- pour nous établir des statistiques sur la pauvreté et les classes moyennes ? Un cabinet d’étude pourrait bien faire l’affaire sur la base d’un deal ponctuel self-liquidating. A-t-on vraiment besoin de tout un secrétariat d’Etat pour la solidarité nationale et la protection de l’enfance, d’autant moins qu’après deux années d’existence, le même secrétariat en est encore au niveau de la réflexion et de l’exploration des pistes à emprunter et dans l’attente de rapports d’études de faisabilité ? La solidarité nationale et la protection de l’enfance ne peuvent se concevoir que s’ils sont déclinés sous forme d’objectifs globaux intégrés dans le cadre d’une politique sociale tout azimut de tout un gouvernement. La solidarité nationale et l’enfance ne sauraient en aucun cas être la spécialité de tel ou tel ministère, de même que ne peut l’être la jeunesse et le sport.

Le problème au Maroc est lié aux mauvais diagnostics. L’on dégrossit le corps enseignant, le corps des infirmiers et celui des médecins, dont nous avons tant besoin, au moment où il faut s’atteler à élaguer les administrations et les ministères tentaculaires et impotents.

Le mot de la fin : le Maroc mérite mieux.

Mostafa Melgou

   

 



28/10/2009
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