zankana

J'ai toujours été taraudé par cette hégémonie financière du Dollar qui confère aux USA ce pouvoir de domination, sans partage, du monde. Le pétrole, l'armement et que sais-je d'autres sont facturés en US Dollars. La conséquence coule de source, chaque pays devant constituer ses réserves, principalement, en US Dollars, pour faire face à sa facture pétrolière et à ses besoins de s'armer en engins de la mort.

Le système monétaire international avait changé de cap suite à la décision unilatérale des USA , sous le gouvernement Nixon des années 70, de soustraire la parité du Dollar à " l’étalon- or". Ce tournant décisif dans l’histoire de l ‘économie monétaire a été opéré dans l’indifférence générale d’un monde préoccupé par la guerre Israélo-Arabe d’octobre 1973 et l’embargo pétrolier décidé par Le Roi Fayssal d’Arabie Séoudite, qui s’en était suivi comme mesure de rétorsion économique contre L’Europe et les USA pour leur soutien inconditionnel d’Israël. Personne ne se rendait compte dans quel abîme les USA allaient entraîner le monde, par leur décision fatidique. Décision qui constitue une date- repère dans les annales des crises financières y compris celle qui secoue le monde aujourd’hui. En s’étant détaché de " l’étalon or " qui lui en donnait la mesure et la parité, le Dollar Américain s’est affranchi du seul moyen de sa régulation. Il s’est depuis lors débridé, pour avoir libre cours en " stand alone basis " sans aucun garde-fou.

Ce pouvoir financier inégalé du Dollar, qui s'apparente à un instrument de domination, lui confère ipso facto un pouvoir politique. En effet le Trésor américain ( FED ) a les coudées franches, le Dollar n’étant plus assujetti à aucune contrainte de parité prudentielle. Par le jeu d’une parité dirigée, c’est à dire une parité sous forme de Décrets, signés au gré de leurs seules convenances, les USA subjuguent à leurs diktats tous les pays du monde, y compris la Chine, pourtant communiste. Les USA sont devenus les maîtres- chanteurs du monde, un monde qui est aujourd’hui contraint, à défaut d’autre alternative, de venir à la rescousse de l'empire américain. Nous vivons un véritable dilemme. Ou soit vous renflouez , à la demande, les caisses vides des USA, ou soit, en cas de refus, vous n’aurez que vos larmes pour pleurer devant l’érosion de vos réserves en billet vert, si celui-ci, livré à lui même, devait se métamorphoser en monnaie de singe (stone money). Pensez à la chine, premier créancier des USA avec US$ 4 tln ; au Japon avec US$ 1 tln. Qu’adviendrait-il de leurs soldes et réserves en Dollars si ils ne faisaient pas l’effort de soutenir le dollar ? Une véritable faillite. Le monde est devenu un cashier des USA.Le cas le plus caricatural est celui des pays du Golf, dont les ¾ des réserves monétaires ( des recettes de pétro- dollars ) sont tenues dans les livres de banques américaines ou sous forme de marketable securities détenus sur le marché Américain par les fonds souverains des pays du Golf. Les retombées de la crise sont plus ressenties dans les pays du golf, dont les économies sont tributaires des seuls rentes pétrolières et des produits de placements financiers. Dès lors que leur manne pétrolière tarirait , ils se retrouveront bredouilles, face à leur destin sans recours aucun, n’ayant pas su profiter à ce jour des périodes de " vaches grasses ", pour bâtir des modèles économiques solides et structurants.

Faudrait-il le rappeler, le billet vert a perdu 30% de sa valeur par rapport à l’Euro, rien que sur les deux dernières années et 50% sur le dernier quinquennat, c’est à dire depuis l’invasion de l’Iraq en mars 2003. Toutes les monnaies adossées au Dollar se sont ressenties de cette dépréciation, en terme d’érosion du pouvoir d’achat.

Cette dépréciation " administrée ", sans le dire, par le FED s’inscrit dans une perspective de bouée de sauvetage pour atténuer les énormes coûts de guerre en Afghanistan et en Iraq, qui se chiffrent en plusieurs trilliards. D’une pierre deux coups, un Dollar faible rendra cher ipso facto l’Euro, donc le pénalise, tout en permettant de booster les exportations du nouveau continent, au détriment de celles de l’UE.

Le problème nodal réside, à mon sens, dans cette situation d’hégémonie du Dollar, en tant que monnaie de compte sur le marché du pétrole et de l’armement. Par conséquent chaque soubresaut du Dollar se ressentira immanquablement sur les autres monnaies aussi bien celles qui sont dans son giron que celles qui ne le sont pas.

Il est important de noter que de par son statut de monnaie de référence ou monnaie étalon de facto, le Dollar ne peut , car insensé, être dévalué, nonobstant sa dépréciation de fait. Toutes les tentatives entreprises pour juguler cette poussée inflationniste n’ont pas donné les résultats escomptés. Car nous sommes devant une monnaie globalisée, une monnaie pas comme les autres, qui a sa propre dynamique qu’elle tire de son seul statut impérial, sur lequel personne n’a de prise sauf la bonne santé de l’économie américaine.

Les USA étant aujourd’hui en phase de récession, Il devient de plus en plus urgent et crucial de repenser l’ordre financier international, pour ne pas exposer l’équilibre terrestre à des sorts apocalyptiques .

Il n’est pas aisé de détrôner les USA du leadership du monde. pour moult raisons- l’étendue et la richesse de leur territoire, leur mode d’organisation et de gouvernance et surtout le statut supranational pour ne pas dire impérial de leur firmes et la puissante intégration de leur économie. Le monde est devant un défi-le défi Américain. Ni l’Europe ni la Chine, ni la Russie ne peuvent , prises séparément, faire le contrepoids aux USA.

Seuls les grands espaces régionaux tels UE, GCC, Asean ..etc peuvent venir à bout de l’hégémonie du billet vert, en prenant la décision politique de ne plus traiter en Dollar les transactions commerciales et financières intra-groupe.

Il y a un commencement à tout, il suffit d’oser.

                                                                                Mostafa Melgou