zankana

zankana

Combattre la corruption : Modus operandi

Le volume de flux d’argent " sale " brassé lors des dernières communales remet à l’ordre du jour le problème de la corruption dans notre pays, problème qui n’a pas encore trouvé de solution idoine. En effet, le dernier classement de l’Indice de perception de la corruption (IPC) 2008 de Transparency international, montre que le Maroc n’a enregistré aucune avancée, par rapport à l’année précédente. Une note de 3,5 (sur 10), exactement comme en 2007, sur une échelle de notation de 1 (haut degré de corruption perçu) à 10 (faible degré de corruption perçu). L’Indice de Perception de la Corruption évalue la perception du niveau de corruption affectant les administrations publiques et la classe politique. Pour ce qui est de son classement, au lieu de la 72ème en 2007, le Maroc rétrograde, en 2008, à la 80ème position sur un total de 180 pays.

La corruption a un coût. Très élevé. Elle peut réduire le taux de croissance d'un pays de 0,5 à 1% par an. Les investissements réalisés dans les pays corrompus sont inférieurs d'environ 5% à ceux réalisés dans les pays relativement non corrompus. les pays qui apprennent à maîtriser la corruption peuvent espérer voir leur revenu par habitant quadrupler à long terme. Par ailleurs, dans un pays à faible corruption la croissance des entreprises peut être majorée de 3%, en comparaison avec des entreprises , à proportions égales (peer Co’s) ,installées dans des environnements à forte corruption. Une étude consacrée à l'investissement direct étranger observe que la corruption est équivalente à une taxe officieuse additionnelle de 20% imposée aux investisseurs étrangers.

En guise de mesure pour atténuer l’ampleur de la corruption, le Maroc s’est doté d’instances telles l’ " Instance Nationale de la Protection des Deniers Publics " ou l’ "instance centrale pour la prévention de la corruption" ( ICPC) et j’en passe et des meilleurs " Diwan Al Mazalim ". Objectifs : la moralisation de la chose publique.

L’ICPC comprend une quarantaine de membres désignés pour un mandat de 4 ans, représentant les ministères, les organisations professionnelles et les syndicats. Entre autres recommandations de l’Instance, l’élaboration d’une charte déontologique par les différentes Administrations, ainsi que les collectivités locales. De même, qu’elle est habilitée à formuler des avis consultatifs ayant trait notamment à la diligence des transactions économiques et financières. L’instance sera chargée d’autre part de donner aux autorités administratives des avis sur les mesures susceptibles d’être prises pour prévenir des faits de corruption. Elle devra également informer l’autorité judiciaire compétente de tous les faits de corruption portés à sa connaissance. C’est dire que tout le monde s’accorde pour reconnaître que la corruption est un profond mal qu’il faut éradiquer de notre société. La corruption ré-instaure le pouvoir du " cens " et partant vide la notion de l’Etat de droit de sa substance. Elle est préjudiciable à l’Economie et entrave toute velléité d’ouverture démocratique. Je précise toutefois qu’il serait injuste de jeter toujours son dévolu sur l’autre. La corruption est un phénomène de société, touchant gouvernants et gouvernés. Une autre précision me paraît tout aussi importante : Il ne faut pas que le discours sur la problématique de la corruption soit une occasion pour purger nos passions. De même que le foisonnement d’instances officielles risque d’être contre-productif, dès lors que l’histoire a montré que, pour escamoter un mal ou pou " noyer le poisson ", on lui crée une commission, un comité ou une instance. Parfois, la création même de ces " institutions " et le choix des hommes qui les dirigeront (anciens détenus politiques, anciens incendiaires gauchistes) peuvent procéder de soubassements corrupteurs, dans l’objectif bien compris de " pacifier " la société et de se dédouaner des sévices assénés, par le passé ( les années de plomb) à l’opposition. C’est pourquoi mon billet se veut un modus- operandi de ce qui pourrait être une démarche pratique, pour lutter contre la corruption.

La première étape, plutôt un préalable incontournable, serait un vouloir populaire fortement exprimé de lutte contre la corruption. Ce vouloir s’avérerait vain, s’il n’est pas appuyé d’une volonté politique au plus haut niveau, avec des signaux forts et des valeurs d’exemples. De même qu’il est absurde et contre productif de s’acharner sur la petite corruption, lorsque tout le monde constate que la grande reste impunie. La discrimination ici est lourde de conséquence.

A partir de là, il me paraît judicieux de faire l’état des lieux pour faire un diagnostic objectif et juste de ce mal. Nous le savons il est très difficile de sommer quelqu’un du délit de corruption en l’absence de preuves tangibles, sauf dans certains cas de flagrants délits. Aussi, je propose d’instituer la notion de " présomptions " fortes, en lieu et place de preuves. Ce faisant éviterait l’écueil de l’apport de preuves. Le Conseil de Doléances " Diwan Al Mazalim " ou l’"ICPC" , peu importe, pourrait bien constituer une chambre d’enregistrement de réclamations de cas de corruption, avec l’objectif de construire une base de données, permettant d’établir un " track record " qui appuierait les présomptions éventuelles. Un groupe de travail de trois à quatre personnes relevant de l’autorité du Diwan ou de l’instance pourrait bien réussir cette mission de diagnostic. Le diagnostic ne peut conduire à plus de deux scénarii. Le premier où la corruption en est encore au stade anodin, c’est à dire l’affaire de quelques véreux égarés et malades. Auquel cas, l’on se contenterait de mesures préventives, telle l’incitation à plus de civisme, à travers des discours vertueux et moralisants, avec introduction de chartes collectives de déontologie dans la fonction publique. Le deuxième scénario sur le quel pourrait déboucher éventuellement le diagnostic serait que la corruption est bien enracinée chez nous et que notre tissu social est bien entamé, voire gangrené. Pire, si le diagnostic conclut sur une " kleptocratie " qui ne dit pas son nom. Auquel cas il faut passer à la vitesse supérieure, à savoir prendre des mesures curatives et opérer la "Césarienne " pour extirper le mal de la corruption. Quelques remèdes curatifs me paraissent aisément envisageables :

Au niveau de la judicature : considérer le délit de la corruption comme étant une trahison contre sa société et rendre passible de peines criminelles les plus lourdes tout acte de corruption active ou passive d'un agent public. Avec, bien entendu, tout ce qui s’en suit de privation de liberté, de saisies-arrêts et de saisies conservatoires,

Au niveau opérationnel : mettre en place une escouade anti-corruption à constituer d’agents triés sur le volet et reconnus pour leur probité. Munis de plein pouvoir et relevant du pouvoir législatif, ces agents pourchasseront pour les débusquer tous délinquants, dont l’acte de corruption aura été fondée sur des présomptions solides.

Les media doivent être mis à contribution pour publier les photos des corrompus avérés, en élaborant sur l’origine de leur richesse et en les mettant à l’indexe comme étant des "personae non grata ".

En attendant la construction d’un système national de " piliers de l’intégrité ", l’on se contentera de grive faute de merle.

Mostafa Melgou





20/07/2009
0 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 25 autres membres